Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

calèche ralentie. Les voitures, égayées par de vives toilettes et de clairs visages, allaient à la file, au pas. Des saluts s’échangeaient d’une voiture à l’autre, et des cavaliers s’approchaient, en souriant, des femmes épanouies sous le fond sombre des capotes abaissées. Une noce d’ouvriers défilait, à pied, par couples, dans la contre-allée.

Hélène trouvait à son mari une roideur correcte qui ne lui déplaisait pas. Elle lui savait gré de son bon ton et de son flegme. Le silence de cet homme, le calme de sa face, la simplicité de ses idées la contentaient alors, comme autant de ménagements délicats donnés à une convalescente. Elle l’estimait précieux depuis qu’elle l’avait sauvé. D’ailleurs, ayant peur de penser, elle goûtait les délices d’une fatigue modérée et d’une faiblesse qui diminuait. Elle se pelotonnait avec la volupté d’une chatte frileuse.

Ils descendirent près de la cascade et entrèrent dans le chalet d’un cafetier pour y boire un verre de lait.

À sa droite et à sa gauche, les tables étaient occupées par des vieillards qui chuchotaient, et des frissons d’étoffes se mêlaient aux faibles siffle-