Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/88

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tout sera préférable à mon angoisse d’aujourd’hui.

Toutefois il demanda respectueusement s’il ne serait pas préférable que la curie le déposât d’accord avec les bureaux de M. Dumay ; et il fit observer très justement que, faute d’agir à ce sujet de concert avec le gouvernement français, son Éminence le secrétaire d’État précipitait la séparation de l’Église et de la République.

Le Cardinal répondit une seconde fois :

— Il faudra donner votre démission.

Le malheureux évêque protesta de sa soumission absolue.

— Mais encore, dit-il, voudrais-je savoir pourquoi je suis condamné, sans recours et sans défense. Le Saint-Office possède-t-il donc la preuve irrécusable des prétendues immoralités qu’on me reproche ?

— Oh ! fit le cardinal, avec un haussement d’épaules, s’il n’y avait que cela ! Mais vous avez livré au bras séculier le secret de l’Église[1].

Le Cardinal secrétaire parlait en prêtre qui pèse la gravité des fautes. Il ne faut pas être un bien subtil casuiste pour savoir qu’il y a moins de malice à pécher avec une Carmélite qu’à rapporter à M. Dumay les décisions du Saint-Siège.

Après s’être démis de leur évêché entre les mains du secrétaire d’État du Vatican, M. Le Nordez et M. Geay se jetèrent aux pieds du Souverain Pontife,

  1. Au Tribunal de Rome, par F.-J. Mouthox, dans le Matin du 16 septembre 1904.