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de la fable toutes les notions dont ils ont besoin pour vivre. Il ne leur en faut pas beaucoup ; et quelques simples mensonges suffisent à dorer des millions d’existences. Bref la vérité n’a point de prise sur les hommes. Et il serait fâcheux qu’elle en eût, car elle est contraire à leur génie comme à leurs intérêts.

— Monsieur Bergeret, vous êtes comme les Grecs, dit M. Leterrier. Vous faites de beaux sophismes et vos raisonnements semblent modulés sur la flûte de Pan. Pourtant je crois avec Renan, je crois avec Émile Zola, que la vérité porte en elle une force pénétrante que n’a point l’erreur ni le mensonge. Je dis « la vérité » et vous m’entendez bien, monsieur Bergeret. Car ces mots si beaux de vérité et de justice, il suffit de ne point les définir pour en entendre parfaitement le véritable sens. Ils ont par eux-mêmes une beauté qui brille et une lumière céleste. Je crois donc au triomphe de la