Page:Anatole France - L’Anneau d’améthyste.djvu/248

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maîtres chanteurs, s’était abattue autour de la caserne où le riche soldat faisait son service. En épluchant les pommes de terre, il aurait pu s’enorgueillir d’avoir assemblé, si loin de Paris, une société si parisienne. Mais il avait l’habitude de la vie, l’expérience des hommes, et cette gloire ne le flattait pas. Il était morose et soucieux. Il n’avait qu’une ambition, se faire octroyer le bouton des Brécé. Il le désirait avec la violence héréditaire, avec cette force que le grand baron avait montrée dans la conquête des choses, des corps et des âmes, mais non pas certes avec l’intelligence claire et profonde, le génie de son énorme père. Lui-même, il se sentait inférieur à ses richesses ; il en souffrait et il en devenait méchant.

Il songeait :

« Leur bouton, ils ne le donnent pas qu’à des ducs et pairs, bien sûr ! Les Brécé, c’est plein d’Américaines et de juives. Je les vaux bien. »