Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/188

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digne de l’admiration de quiconque sait estimer les bonnes lettres.

— Jacques Tournebroche, me dit-il, la principale difficulté de cette lecture consiste en ce que diverses lettres peuvent être aisément confondues avec d’autres, et il importe au succès du déchiffrement de dresser un tableau des caractères qui prêtent à de semblables méprises, car, faute de prendre ce soin, nous risquerions d’adopter de mauvaises leçons, à notre honte éternelle et juste vitupère. J’ai fait aujourd’hui même de risibles bévues. Il fallait que j’eusse, dès matines, l’esprit troublé par ce que j’ai vu cette nuit et dont je vais vous faire le récit.

» M’étant réveillé au petit jour, il me prit l’envie d’aller boire un coup de ce petit vin blanc, dont il vous souvient que je fis hier compliment à M. d’Astarac. Car il existe, mon fils, entre le vin blanc et le chant du coq, une sympathie qui date assurément du temps de Noé, et je suis certain que si saint Pierre, dans la sacrée nuit qu’il passa dans la cour du grand sacrificateur, avait bu un doigt de vin clairet de la Moselle, ou seulement d’Orléans, il n’aurait pas renié Jésus avant que le coq eût chanté pour la seconde fois.