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son sommeil, un Sylphe, qui l’aimait, le transporta en esprit à Stockholm, l’introduisit dans le palais de la reine Christine, le conduisit dans la bibliothèque et tira d’une des tablettes un manuscrit de Pindare, qu’il lui ouvrit à l’endroit difficile. Les cinq vers s’y trouvaient avec deux ou trois bonnes leçons qui les rendaient tout à fait intelligibles.

» Dans la violence de son contentement, notre savant se réveilla, battit le briquet et nota tout aussitôt au crayon les vers tels qu’il les avait retenus. Après quoi il se rendormit profondément. Le lendemain, réfléchissant sur son aventure nocturne, il résolut d’en être éclairci. M. Descartes était alors en Suède, auprès de la reine, qu’il instruisait de sa philosophie. Notre pindariste le connaissait ; mais il était en commerce plus familier avec l’ambassadeur du roi de Suède en France, M. Chanut. C’est à lui qu’il s’adressa pour faire tenir à M. Descartes une lettre par laquelle il le priait de lui dire s’il se trouvait réellement dans la bibliothèque de la Reine, à Stockholm, un manuscrit de Pindare contenant la variante qu’il lui désignait. M. Descartes, qui était d’une extrême civilité, répondit à l’académicien de Dijon que Sa Majesté possé-