Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/265

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propres, m’a dit Thérèse, et cette fois, encore, je sortirai avec vous ; je prendrai votre pliant, comme j’ai fait ces derniers jours, et nous irons nous mettre au soleil.

En vérité, Thérèse me croit infirme. J’ai été malade, sans doute, mais il y a fin à tout. Madame la Maladie s’en est allée, il y a beau temps, et voilà bien trois mois que sa suivante au pâle et gracieux visage, dame Convalescence, m’a fait gentiment ses adieux. Si j’écoutais ma gouvernante, je serais M. Argant tout bonnement, et je me coifferais, pour le reste de mes jours, d’un bonnet de nuit à rubans… Pas de cela ! J’entends sortir seul. Thérèse ne l’entend pas. Elle tient mon pliant et veut me suivre.

— Thérèse, nous nous mettrons demain en espalier contre le mur de la petite Provence, tant qu’il vous fera plaisir. Mais aujourd’hui j’ai des affaires qui pressent.

Des affaires ! Elle croit qu’il s’agit d’argent et m’explique que rien ne presse.

— Tant mieux ! mais il y a d’autres affaires que celles-là, en ce monde.

Je supplie, je gronde, je m’échappe.

Il fait assez beau temps. Moyennant un fiacre