Page:Anatole France - Le Livre de mon ami.djvu/236

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

minée et ne lâchant pas la queue de la poêle, regardait d’un œil méfiant la Parisienne et sa bonne. Mais elle trouva le petit « bien mignon et tout le portrait de son père ». Quant au bonhomme Trévière, sec et roide dans sa veste de gros drap, il était bien content de voir son petit-fils André.

On n’avait pas fini de souper, et déjà André donnait de gros baisers à son grand-papa, dont le menton piquait, piquait. Puis, monté tout droit sur les genoux du bonhomme, il lui enfonçait le poing dans la joue, en lui demandant pourquoi c’était creux.

— Parce que je n’ai plus de dents.

— Et pourquoi tu n’as plus de dents ?

— Parce qu’elles étaient devenues noires et que je les ai semées dans le sillon pour voir s’il n’en pousserait point des blanches.

Et André riait de tout son cœur. Les joues de son grand-père, c’était bien autre chose que les joues de sa maman !

On avait réservé à la Parisienne et au petit la chambre d’honneur, où étaient le lit nuptial, dans lequel les bonnes gens n’avaient couché qu’une fois, et l’armoire de chêne, bourrée de