Page:Anatole France - Le Livre de mon ami.djvu/300

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la parole imagée, vivante, animée, le mythe jaillit et le conte sortit du mythe. Le conte se transforma sans cesse ; car le changement est la première nécessité de l’existence. Il fut pris au mot et à la lettre et ne rencontra pas, par bonheur, des gens d’esprit pour le réduire en allégorie et le tuer du coup. Les bonnes gens voyaient, en Peau d’Âne, Peau d’Âne elle-même, rien de plus, rien de moins. Perrault n’y chercha pas autre chose. La science vint qui embrassa d’un coup d’œil le long trajet du mythe et du conte et dit : « L’aurore devint Peau d’Âne. » Mais il faut qu’elle ajoute que, dès que Peau d’Âne fut imaginée, elle prit une physionomie particulière et vécut pour son propre compte.

laure

Je commence à voir clair dans ce que vous dites. Mais, puisque vous nommez Peau d’Âne, je vous avouerai qu’il y a dans son histoire quelque chose qui me choque au dernier point. Est-ce un Indien qui a donné au père de Peau d’Âne cette odieuse passion pour sa fille ?