Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/334

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— Je ne vous ai pas dit combien votre ébauche m’a plu. C’est Florence, au bord de l’Arno. Alors, c’est nous ?

— Oui, j’ai mis dans cette figure l’émotion de mon amour. Elle est triste, et je voudrais qu’elle fût belle. Voyez-vous, Thérèse, la beauté est douloureuse. C’est pourquoi, depuis que ma vie est belle, je souffre.

Il fouilla la poche de sa veste de flanelle et en tira son étui à cigarettes. Mais elle le pressa de s’habiller. Elle l’emmenait déjeuner chez elle. Ils ne se quitteraient pas de la journée. Ce serait délicieux.

Elle le regarda avec une joie enfantine. Puis elle s’attrista, songeant qu’il lui faudrait, à la fin de la semaine, retourner à Dinard, ensuite aller à Joinville, et que, pendant ce temps, ils seraient séparés.

À Joinville, chez son père, elle le ferait inviter pour quelques jours. Mais ils n’y seraient pas libres et seuls comme à Paris.

— C’est vrai, dit-il, que Paris nous est bon, dans son immensité confuse.

Et il ajouta :

— Même en ton absence, je ne peux plus quitter Paris. Il me serait odieux de vivre dans des pays qui ne te connaissent pas. Un ciel, des montagnes, des arbres, des fontaines, des statues qui