Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/123

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le geste, il en eut une idée forte comme un acte, dont il resta accablé.

Puis il réfléchit et, lentement, mollement, il s’égara dans un dédale d’incertitudes et de contradictions. Ses idées se diluaient, mêlaient, fondaient leurs teintes, comme des gouttes d’aquarelle dans un verre d’eau. Et bientôt il perdit jusqu’à l’intelligence de l’événement.

Il promena ses malheureux regards autour de lui, examina les fleurs du papier de tenture et remarqua qu’il y avait des bouquets mal raccordés, en sorte que des moitiés d’œillets rouges ne se rejoignaient pas. Il regarda ses livres rangés sur les tablettes de sapin. Il regarda la petite pelote de soie et de crochet que madame Bergeret avait faite elle-même et lui avait donnée, quelques années auparavant, pour sa fête. Alors il s’attendrit à la pensée de l’intimité rompue. Il n’avait jamais beaucoup aimé cette femme, qu’il avait épousée sur des conseils d’amis,