Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/36

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que la France n’est plus l’amie du genre humain, la concitoyenne des peuples ; c’est qu’elle n’ouvre plus les mains pour répandre ces semences de liberté qu’elle jetait jadis par le monde avec une telle abondance et d’un geste si souverain, que longtemps toute belle idée humaine parut une idée française ; c’est qu’elle n’est plus la France des philosophes et de la Révolution et qu’il n’y a plus, dans les greniers voisins du Panthéon et du Luxembourg, de jeunes maîtres écrivant, la nuit, sur une table de bois blanc, ces pages qui font tressaillir les peuples et pâlir les tyrans. Ne vous plaignez donc pas d’avoir perdu la gloire que redoute votre prudence.

» Surtout, ne dites pas que vos disgrâces viennent de vos défaites. Dites qu’elles viennent de vos fautes. Une nation ne souffre pas plus d’une bataille perdue qu’un homme robuste ne souffre d’une égratignure reçue dans un duel à l’épée. C’est