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Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/85

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La nymphe s’échappe, inquiète, troublée.

Elle approche de la ville ; et la métamorphose s’accomplit.


La pierre du quai dur lui rabote les hanches,
Sa poitrine est hérissée d’un poil rude,
Et noire de charbons, que délaye la sueur,
La nymphe est devenue un débardeur.
Et là-bas est le dock
Pour le coke.


Et le poète chanta le fleuve traversant la cité.


Et le fleuve, d’ores en avant municipal et historique,
Et dignement d’archives, d’annales, de fastes,
De gloire.
Prenant du sérieux et même du morose
De pierre grise,
Se traîne sous la lourde ombre basilicale
Que hantent encore des Eudes, des Adalberts,
Dans les orfrois passés,
Évêques qui ne bénissent pas les noyés anonymes,
Anonymes,
Non plus des corps, mais des outres,
Qui vont outre,
Le long des îles en forme de bateaux plats
Avec, pour mâtures, des tuyaux de cheminées.
Et les noyés vont outre.
Mais arrête-toi aux parapets doctes
Où, dans les boîtes, gît mainte anecdote,