Page:Anatole France - Les Contes de Jacques Tournebroche.djvu/213

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’une armée immobile et qui maintenant faisaient, non pas même une ruine, mais un fumier sur le sol. Et il songea :

— Voilà ce qui reste de tant d’âges d’hommes ! Voilà ce qu’ils ont fait des demeures où les chefs atrébates suspendaient leurs armes !

Le soleil s’était levé sur les gradins de l’amphithéâtre, et le Gaulois parcourait avec une haine insatiable et curieuse le vaste chantier de briques et de pierres. De ces durs monuments de la conquête il remplissait le regard de ses grands yeux bleus, et il secouait dans l’air frais sa longue crinière fauve. Se croyant seul, il murmurait des imprécations. Mais, à quelque distance du chantier, il aperçut, au pied d’un tertre couronné de chênes, un homme assis sur une pierre moussue, la tête couverte de son manteau et penchée. Il ne portait point d’insignes, mais il avait au doigt l’anneau de chevalier, et l’Atrébate avait assez l’habitude du camp romain pour reconnaître un tribun militaire. Ce soldat écrivait sur des tablettes de cire et semblait tout entier à