Page:Anatole France - Les Contes de Jacques Tournebroche.djvu/96

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— Essayez, dit-elle en lui donnant de petits soufflets avec le creux rose de sa main.

Mais il était déjà maître de tout prendre selon son désir. Elle criait :

— Je ne veux point. Fi ! fi ! Messire, vous ne ferez point cela. Mon ami… mon cœur !… Je meurs.

Et quand elle eut fini de soupirer et d’expirer, elle dit gracieusement :

— Messire Philippe, ne vous flattez point de m’avoir prise par force ou par surprise. Si vous avez eu de moi ce que vous vouliez, c’est de mon gré, et je n’ai fait de défense qu’autant qu’il fallait pour être vaincue à souhait. Doux ami, je suis vôtre. Si malgré votre beauté dont je fus d’abord charmée, au mépris de la douceur de votre amitié, je ne vous avais point accordé encore ce que vous venez de prendre avec mon consentement, c’est que je n’avais point de réflexion ; je ne me sentais point pressée par le temps, et, plongée dans une molle indolence, je ne tirais nul bien de ma jeunesse et de ma beauté. Mais le bon frère Jean Turelure m’a donné une leçon profitable.