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de la duchesse de cicogne

— Boulingrin, souffla la duchesse à son vieil ami dans le tuyau de l’oreille, est-ce que cette affaire ne vous paraît pas louche ? N’y soupçonnez-vous pas une intrigue des frères du roi pour amener le pauvre homme à abdiquer ? On le sait bon père… Ils ont bien pu vouloir le jeter dans le désespoir…

— C’est possible, répondit le secrétaire d’État. Dans tous les cas, il n’y a pas la moindre féerie dans cette affaire. Les bonnes femmes de campagne peuvent seules croire encore à ces contes de Mélusine…

— Taisez-vous, Boulingrin, fit la duchesse. Il n’y a rien d’odieux comme les sceptiques. Ce sont des impertinents qui se moquent de notre simplicité. Je hais les esprits forts ; je crois ce qu’il faut croire ; mais je soupçonne ici une sombre intrigue…

Au moment où Cicogne prononçait ces paroles, la fée Viviane les toucha tous deux de sa baguette et les endormit comme les autres.