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LES DIEUX ONT SOIF

lui ai remises. La petite Joséphine a eu mal au ventre pour avoir mangé trop de confitures, que le menuisier lui avait données. Je lui ai fait de la tisane… Desmahis est venu te voir ; il a regretté de ne pas te trouver. Il voudrait graver un sujet de ta composition. Il te trouve un grand talent. Ce brave garçon a regardé tes esquisses et les a admirées.

— Quand la paix sera rétablie et la conspiration étouffée, dit le peintre, je reprendrai mon Oreste. Je n’ai pas l’habitude de me flatter ; mais il y a là une tête digne de David.

Il traça d’une ligne majestueuse le bras de sa Victoire.

— Elle tend des palmes, dit-il. Mais il serait plus beau que ses bras eux-mêmes fussent des palmes.

— Évariste !

— Maman ?…

— J’ai reçu des nouvelles… devine de qui…

— Je ne sais pas…

— De Julie… de ta sœur… Elle n’est pas heureuse.

— Ce serait un scandale qu’elle le fût.

— Ne parle pas ainsi, mon enfant : elle est ta sœur. Julie n’est pas mauvaise ; elle a de bons sentiments, que le malheur a nourris. Elle t’aime. Je puis t’assurer, Évariste, qu’elle