Page:Anatole France - Rabelais, Calmann-Lévy, 1928.djvu/88

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faudra plus d’oresenavant trouver en place ni en compagnie, qui ne sera bien poli en l’officine de Minerve. Je vois les brigands, les bourreaux, les aventuriers, les palfreniers de maintenant plus doctes que les docteurs et prêcheurs de mon temps.

» Que dirai-je ? Les femmes et les filles ont aspiré à cette louange et manne céleste de bonne doctrine…

» C’est pourquoi, mon fils, je t’admoneste, que tu emploies ta jeunesse à bien profiter en étude et en vertus. Tu es à Paris, tu as ton précepteur Épistémon, dont l’un par vives et vocales instructions, l’autre par louables exemples, te peuvent endoctriner. J’entends et veux que tu apprennes les langues parfaitement. Premièrement, la grecque, comme le veut Quintilien ; secondement, la latine, et puis l’hébraïque pour les saintes lettres, et la chaldaïque et arabique pareillement ; et que tu formes ton style, quant à la grecque, à l’imitation de Platon, quant à la latine, de Cicéron. Qu’il n’y ait histoire que tu ne tiennes en mémoire présente, à quoi t’aidera la cosmographie de ceux qui en ont écrit. Des arts libéraux, géométrie, arithmétique et musique, je t’en donnai quelque goût, quand tu étais encore petit, en l’âge de cinq à six ans ; poursuis le reste, et d’astronomie saches-en toutes les règles. Laisse-moi l’astrologie divinatrice et l’art de Lullius (Raymond Lulle) comme abus et vanités.