Page:Anatole France - Thaïs.djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

changera en un Jourdain, dont les ondes, répandues sur toi, te donneront la vie éternelle ?

Thaïs n’était plus irritée.

— Cet homme, pensait-elle, parle de vie éternelle et tout ce qu’il dit semble écrit sur un talisman. Nul doute que ce ne soit un mage et qu’il n’ait des secrets contre la vieillesse et la mort.

Et elle résolut de s’offrir à lui. C’est pourquoi, feignant de le craindre, elle s’éloigna de quelques pas et, gagnant le fond de la grotte, elle s’assit au bord du lit, ramena avec art sa tunique sur sa poitrine, puis, immobile, muette, les paupières baissées, elle attendit. Ses longs cils faisaient une ombre douce sur ses joues. Toute son attitude exprimait la pudeur ; ses pieds nus se balançaient mollement et elle ressemblait à une enfant qui songe, assise au bord d’une rivière.

Mais Paphnuce la regardait et ne bougeait pas. Ses genoux tremblants ne le portaient plus, sa langue s’était subitement desséchée dans sa bouche ; un tumulte effrayant s’élevait dans sa tête. Tout à coup son regard se voila et il ne vit plus devant lui qu’un nuage épais.