Page:Anatole France - Thaïs.djvu/175

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divinité, quand ils la peignaient si paisible, si superbe et si fatale, et lorsqu’ils lui faisaient cette invocation : « Âme sereine comme le calme des mers ! »

» C’est ainsi qu’Eunoia fut entraînée par la pitié dans le mal et dans la souffrance. Elle mourut, et les Lacédémoniens montrent son tombeau, car elle devait connaître la mort après la volupté et goûter tous les fruits amers qu’elle avait semés. Mais, s’échappant de la chair décomposée d’Hélène, elle s’incarna dans une autre forme de femme et s’offrit de nouveau à tous les outrages. Ainsi, passant de corps en corps, et traversant parmi nous les âges mauvais, elle prend sur elle les péchés du monde. Son sacrifice ne sera point vain. Attachée à nous par les liens de la chair, aimant et pleurant avec nous, elle opérera sa rédemption et la nôtre, et nous ravira, suspendus à sa blanche poitrine, dans la paix du ciel reconquis.

HERMODORE

Ce mythe ne m’était point inconnu. Il me souvient qu’on a conté qu’en une de ses méta-