Page:Anatole France - Thaïs.djvu/245

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regardaient avec des yeux en pleurs sur un visage inanimé. Il faisait sur eux le signe de la croix. On lui porta sur une civière une jeune fille d’Aphroditopolis qui, après avoir vomi du sang, dormait depuis trois jours. Elle semblait une image de cire et ses parents, qui la croyaient morte, avaient posé une palme sur sa poitrine. Paphnuce, ayant prié Dieu, la jeune fille souleva la tête et ouvrit les yeux.

Comme le peuple publiait partout les miracles opérés par le saint, les malheureux atteints du mal que les Grecs nomment le mal divin, accouraient de toutes les parties d’Égypte en légions innombrables. Dès qu’ils apercevaient la stèle, ils étaient saisis de convulsions, se roulaient à terre, se cabraient, se mettaient en boule. Et, chose à peine croyable ! les assistants, agités à leur tour par un violent délire, imitaient les contorsions des épileptiques. Moines et pèlerins, hommes, femmes, se vautraient, se débattaient pêle-mêle, les membres tordus, la bouche écumeuse, avalant de la terre à poignée et prophétisant. Et Paphnuce, du haut de sa colonne, sentait un frisson lui secouer les membres et criait vers Dieu :