Page:Anatole France - Thaïs.djvu/47

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un lieu d’exil, le moine échappe à la terre. J’ai détourné mon cœur de ton amour, Alexandrie. Je te hais ! Je te hais pour ta richesse, pour ta science, pour ta douceur et pour ta beauté. Soit maudit, temple des démons ! Couche impudique des gentils, chaire empestée des ariens, sois maudite ! Et toi, fils ailé du Ciel qui conduisis le saint ermite Antoine, notre père, quand, venu du fond du désert, il pénétra dans cette citadelle de l’idolâtrie pour affermir la foi des confesseurs et la constance des martyrs, bel ange du Seigneur, invisible enfant, premier souffle de Dieu, vole devant moi et parfume du battement de tes ailes l’air corrompu que je vais respirer parmi les princes ténébreux du siècle !

Il dit et reprit sa route. Il entra dans la ville par la porte du Soleil. Cette porte était de pierre et s’élevait avec orgueil. Mais des misérables, accroupis dans son ombre, offraient aux passants des citrons et des figues ou mendiaient une obole en se lamentant.

Une vieille femme en haillons, qui était agenouillée là, saisit le cilice du moine, le baisa et dit :