Chez le peuple, et non seulement chez le paysan, mais chez l’ouvrier, chez le petit bourgeois et le marchand des villes, le sentiment religieux a conservé son antique naïveté. La religion y donne une incontestable preuve de vie : la fécondité ; elle y est sans cesse en enfantement, mettant au monde des sectes bizarres dont le nombre même est difficile à fixer. L’homme du peuple semble n’avoir pas encore franchi ce degré de civilisation où toutes les conceptions prennent spontanément une forme religieuse. À cet égard, comme à tant d’autres, il est le contemporain de générations depuis longtemps disparues chez nous. S’il est, en Europe, des États où la religion a tenu une aussi grande place, il n’en est peut-être point où elle en occupe encore une aussi large. La rudesse du sol et du climat avait préparé son empire ; les vicissitudes de l’histoire, la forme du gouvernement public et privé l’ont affermi ; l’état de culture l’a maintenu.
Lorsque, au-dessus d’un village des steppes, j’apercevais l’église dominant de ses coupoles vertes les noires cabanes du paysan, il me semblait voir un emblème de cette