Page:Andersen - Contes d'Andersen, traduit par Soldi, Librairie Hachette et Cie, 1876.djvu/363

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pour être content soi-même. Nous sommes douze morceaux, c’est vrai, mais nous formons un seul corps, une douzaine. Quelle incomparable félicité ! »

Les années s’écoulèrent ; c’en était fait de la toile.

« Il faut que toute chose ait sa fin, murmura chaque pièce. J’étais bien disposée à durer encore, mais pourquoi demander l’impossible ? »

Et elles furent réduites en lambeaux et en chiffons, et crurent cette fois que c’était leur fin finale, car elles furent encore hachées, broyées et cuites, le tout sans y rien comprendre. Et voilà qu’elles étaient devenues de superbe papier blanc.

« Ô surprise ! ô surprise agréable ! s’écria le papier, je suis bien plus fin qu’autrefois, et l’on va me charger d’écritures. Que n’écrira-t-on pas sur moi ? Ma chance est sans égale. »

Et l’on y écrivit les plus belles histoires, qui furent lues devant de nombreux auditeurs et les rendirent plus sages. C’était un grand bienfait pour le papier que cette écriture.

« Voilà certes plus que je n’ai rêvé lorsque je portais mes petites fleurs bleues dans les champs. Comment deviner que je servirais un jour à faire la joie et l’instruction des hommes ? Je n’y comprends vraiment rien, et c’est pourtant la vérité.