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CHAPITRE II


EMERSON



IL y a eu dans la formation de la pensée nietzschéenne des influences prolongées durant sa croissance entière : telles les influences grecques. Il y en a eu qui, très vigoureuses dans les premiers temps, ont décru soudainement et ont été combattues par lui avec une ardeur acharnée : ce sont Schiller et les romantiques, Wagner et Schopenhauer. Quelques-unes, très vieilles et qui affleurent rarement à sa conscience, furent très durables, quoique très méconnues. Ralph Waldo Emerson fut un de ces auteurs aimés, dont Nietzsche a absorbé la pensée jusqu’à ne plus toujours la distinguer de la sienne.

Il l’a connu dès sa jeunesse. Ses plus anciennes dissertations de Pforta le citent. Ses tentatives d’alors pour concilier la liberté et la nécessité ne sont pas dénuées d’esprit émersonien[1]. Nietzsche semble avoir lu surtout les Essays, fîrst servies, de 1856 ; puis Conduct of life de 1860 ; Society and Solitude, de 1870 ; enfin les Essays,

  1. Élisabeth Fœrster-Nietzsche, Das Leben F. Nietzsches, I, p. 319. — Sur Emerson, voir un délicat livre de Mlle M. Dugard, Ralph Waldo Emerson, sa vie et son œuvre, 1907. — Il est regrettable que la question des sources allemandes de la pensée d’Emerson, effleurée parfois, n’y soit pas traitée, et que dans le chapitre sur son influence, on ne mentionne que son action en pays anglo-saxon.