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LE GOUVERNEUR

jaune verdâtre, et ses cheveux blonds semblaient se détacher de la tête. De sa main gauche, il tenait une feuille de papier pliée ; l’autre main était plongée au fond d’une poche.

Et aussitôt, ils comprirent, le gouverneur, que la mort venait, et eux, que le gouverneur le savait.

— Excusez-nous ! dit l’un, et son visage se contracta en une affreuse grimace.

— Une supplique ? À propos de quoi ? demanda le gouverneur, sans conviction ; mais il lui semblait qu’il était obligé de jouer son rôle jusqu’au bout. Cependant il n’étendit pas la main pour prendre la feuille.

Tout en gardant dans la main gauche le papier qui ne trompait personne, sans même le tendre au gouverneur, l’homme sortit avec effort un revolver, qui s’était accroché à la doublure de sa poche.

Le gouverneur jeta un regard oblique autour de lui ; il vit une place sale et déserte, avec des brindilles de foin répandues dans la boue, un mur. Qu’importait, il était trop tard ! il poussa un soupir court, mais terriblement profond, et se