— Eh bien, va-t’en ! Sans cela « il » criera !
— C’est vrai ! répliqua Sazonka enchanté du prétexte. Du reste, c’est ce qu’il a recommandé ; « dépêche-toi », m’a-t-il dit, « tu reviendras tout de suite, et sans aller boire ». Quel diable que cet homme !
Mais dès qu’il eut senti qu’il pouvait s’en aller immédiatement, Sazonka éprouva une profonde pitié pour le petit Sénista à la grosse tête. Ce sentiment lui vint à la vue du décor inaccoutumé, de la rangée compacte des lits occupés par des êtres pâles et maussades. L’odeur des médicaments, jointe aux émanations des malades, imprégnait l’atmosphère. La sensation de sa propre force et de sa santé retenait aussi l’ouvrier. Sans éviter plus longtemps le regard suppliant de l’enfant, Sazonka se pencha vers lui et répéta avec fermeté :
— N’aie pas peur, Sénista : je viendrai. Dès que je serai libre, je viendrai te voir. Est-ce que nous ne sommes pas des hommes, mon Dieu ?… Nous aussi, nous comprenons ce que nous avons à faire… Mon ami, me crois-tu, oui ou non ?