— Vous ? Vous avez pu jouer ce rôle-là si longtemps ! Ah ! je ne croyais pas qu’un homme fût capable de m’aimer à ce point-là.
Et, d’un mouvement impulsif, à la stupéfaction de tous les spectateurs de cette scène singulière, Amélie se jeta au cou de Gaston.
— Gaston… Loulou… Mon chéri… Je t’adore ! lui dit-elle.
Gisèle fit un signe :
— Laissons-les, dit-elle… nous sommes indiscrets.
Et ils se retirèrent, tandis que les deux amants passaient dans la chambre voisine où Gaston prenait enfin — et comment ? — sa revanche sur le singe.
— Mon cher amant, répétait Amélie, tu m’as sauvée de moi-même. C’est à toi de me pardonner !… J’étais folle !
Et lui répondait :
— Je te pardonne. Tu me pardonnes… Aimons-nous !
M. Anatole Samuel était perplexe. Il avait l’air très ennuyé, et il expliqua son embarras à Gisèle et à son amant :
— Tout cela est très beau ! Ils filent tous les deux le parfait amour ! Mais il y a un vrai singe qui m’attend… Et je me demande ce que je vais dire au professeur Troubelot.
— Ce vieux fou ! dit Gustave.
— Ce vieux fou qui va se venger sur moi ! C’est qu’il attend le résultat de sa grande expérience, lui !… Que vais-je lui dire ?
— Le résultat, déclara Gisèle… Mais il l’a, le résultat ! Puisque Amélie est enceinte…
— Bien sûr… Elle vous doit assez, à vous aussi, pour consentir à continuer à tromper votre patron. Nous allons la conduire chez lui, dès demain. Vous lui annoncerez tout à l’heure qu’elle a ressenti les premiers symptômes de la maternité.
— Vous êtes sûrs au moins qu’elle ne refusera pas ?
— J’en fais mon affaire, déclara Gisèle. Allez en toute quiétude prévenir votre savant.
Anatole Samuel s’en alla donc et reconduisit Joko, comme de coutume, à Valentin Troubelot.