Page:Andrieux - Œuvres de François-Guillaume-Jean-Stanislas Andrieux, Tome 3, 1818.djvu/210

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Il est de ce héros, de Frédéric second,
Qui, tout roi qu’il était, fut un penseur profond,
Redouté de l’Autriche, envié dans Versailles,
Cultivant les beaux-arts au sortir des batailles,
D’un royaume nouveau la gloire et le soutien,
Grand roi, bon philosophe, et fort mauvais chrétien.
Il voulait se construire un agréable asile,
Où, loin d’une étiquette arrogante et futile,
Il pût, non végéter, boire et courir les cerfs,
Mais des faibles humains méditer les travers,
Et mêlant la sagesse à la plaisanterie,
Souper avec d’Argens, Voltaire et La Mettrie.
Sur le riant coteau par le prince choisi,
S’élevait le moulin du meunier Sans-Souci.
Le vendeur de farine avait pour habitude
D’y vivre au jour le jour, exempt d’inquiétude ;
Et, de quelque côté que vînt souffler le vent,
Il y tournait son aile, et s’endormait content.
Très-bien achalandé, grâce à son caractère,
Le moulin prit le nom de son propriétaire ;
Et des hameaux voisins, les filles, les garçons
Allaient à Sans-Souci pour danser aux chansons.
Sans-Souci !… ce doux nom d’un favorable augure
Devait plaire aux amis des dogmes d’Epicure.
Frédéric le trouva conforme à ses projets,
Et du nom d’un moulin honora son palais.
Hélas ! est-ce une loi sur notre pauvre terre
Que toujours deux voisins auront entre eux la guerre ;