Page:Andry - Traité des aliments de carême, 1713, tome II.djvu/102

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qu’en avalant un œuf, on n’avale pas moins que le monde en abregé, ainsi que la figure même de l’œuf le fait voir. Certainement un mets pareil ne peut passer pour indifférent, ou pour un mets méprisable : l’Auteur a raison. Nous venons de remarquer que, selon lui, le crime de l’œuf, c’est d’avoir quelque chose de trop bon, qu’aucune nourriture n’est plus légere, qu’il passe dans les veines sans presque laisser ni crasse ni superflus ; qu’il se change presque tout entier & tout d’un coup dans la sorte de sang la plus pure & la plus parfaite, & qu’à cause de cela même, étant sujet à exciter les passions, on doit boire devant & aprés. Il faut à présent comparer ces paroles avec le langage qui suit, car voici comme nôtre Auteur continuë, aprés avoir dit qu’il faut boire devant & aprés un œuf.

« C’est ici le cas, dit-il, où il est de l’adresse d’un Medecin habile de retarder la digestion. Car un œuf est un soufre, un volatil, un feu prêt à s’allumer. Le développement s’en fera donc d’abord & trop promptement dans l’estomac qui se trouvera fatigué de gonflemens, de tensions, & de plénitude. Il s’en formera enfin, un suc moins laiteux que vineux, propre du moins à porter le trouble dans toute