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bouquiniste. « Ma connaissance de l'histoire ancienne provenait de

la Grammaire géographique de Gtithrie et de Salmon; j'acquis du Spectateur mes connaissances de mœurs modernes, de littérature et de critique. Ces livres, avec les œuvres de Pope, quelques pièces de Shakspeare, TuU et Dickson sur V Agriculture, le Panthéon^ X Essai de Locke sur V Entendement Humain, \ Histoire delà Bible de Stackhouse, le Jardinier anglais de Justice, les Lectures de Boyle, les œuvres d'AUan Ramsay, la Doctrine de VEvangile sur le Péché originel du D"" Taylor, une collection choisie de chansons anglaises et les Méditations d'Hervey avaient été la mesure de mes lectures ^ » Et il ajoute ces mots qui font saisir à son origine sa vocation de chansonnier, au moment très précoce où l'action future point dans une préférence. « La collection de chansons était mon vade mecum. Je les lisais et relisais, en conduisant mon chariot ou en allant au travail, chanson par chanson, vers par vers, notant soigneuse- ment le tendre et le sublime, de l'affectation ou de la boursouflure. Je suis convaincu que je dois à cet exercice beaucoup de mon habileté de critique, telle quelle ^ »

Il n'est guère possible de parcourir la liste de ces auteurs sans faire une remarque importante et à laquelle les critiques anglais ne paraissent pas avoir prêté suffisamment attention. C'est, si on néglige les livres de renseignements, qu'Addison et Pope ont été les deux premiers maîtres littéraires de Burns ; il a été formé, à l'âge où les impressions sont vives et profondes, par les deux écrivains les plus classiques de l'époque classique de la littérature anglaise, j'entends ceux qui ont le mieux possédé, l'un par art et l'autre par grâce de nature, la netteté et la sobriété de la forme, ceux également où l'idée s'ajuste sur un plan très raisonné. Burns a peu lu les auteurs colorés et imaginatifs du xvi^ siècle. Dans sa jeunesse, il n'avait, on le voit, que quelques pièces de Shakspeare ; il n'a connu Spenser que beaucoup plus tard, après qu'il avait déjà fourni la meilleure partie de son œuvre. Il doit peut-être, en partie, à ces modèles, ce que sa poésie a de court, d'arrêté et de direct, on pourrait presque dire de classique. Il faut ajouter à cette influence celle des chansons populaires, dont il parle lui-même et qui souvent, pour d'autres causes, ont des qualités analogues, avec plus de passion.

Le travail d'esprit que ces lectures excitaient faisait naître peu à peu dans ce jeune paysan la conscience confuse de sa force. Il était bien loin de croire qu'il serait jamais un écrivain, un poète. Mais il prenait lentement le sentiment de sa supériorité. Il était fier de ses lectures. Il aimait à se mêler à ces discussions théologiques familières aux paysans

Aulobiographical Leller to /)'" Moore.