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esprit méchants û'ont le pouvoir de poursuivre un malheureux plus loin que le milieu du plus proche cours d'eau. Aussi Tarn, effaré , hagard , le visage dans la crinière de Maggie, éperdument galope ; la horde des sorcières, hurlante, piaillante dans les ténèhres, le poursuit. En avant des autres, Nannie, furieuse d'avoir été vue et hrûlant de se venger de l'imprudent, bondit. La clef de voûte est à quelques centaines de pas.

Ah, Tam ! Ah, Tam ! Tu auras ce que tu mérites !

Ils te rôtiront en enfer comme un hareng !

En vain Kate attend que tu rentres !

Kale sera bientôt une femme éplorée !

Allons ! Fais ton possible ! cours vite, Meg,

Et gagne la clef de voûte du pont.

Là, tu pourras secouer ta queue à leur nez,

Elles n'osent pas traverser un ruisseau courant.

Mais avant qu'elle eût atteint la clef de voûte,

Du diable si elle avait encore une queue à secouer !

Car Nannie, bien avant les autres,

Serrait de près la noble Maggie,

Et se précipitait sur Tam, avec un dessein furieux.

Mais elle connaissait mal le fond de Maggie,

Celle-ci d'un bond mit son maître en sûreté ;

Quant à elle-même, elle perdit sa queue grise :

La sorcière la saisit par le croupion.

Et laissa à Maggie à peine un moignon.

Sauvé, Tam ! Mais rien ne le ferait s'arrêter. Il sent toujours sur ses épaules la bande infernale. Il continue à galoper sans tourner la tête. Il se perd dans la nuit. La jolie courte chemise agite furieusement la queue de Maggie. Elle trouve cette vengeance insuffisante. L'histoire s'arrête sur ce tableau et se termine par cette morale.

Maintenant, vous qui lirez celte histoire vraie,

Hommes et fils de bonnes Mères, prenez garde :

Chaque fois que vous serez enclin à boire,

Ou que de courtes chemises vous passeront par la tête,

Réfléchissez ! Vous pouvez payer vos joies trop cher :

Rappelez-vous la jument de Tam de Shanier !

A la vérité, l'histoire ressemble à la jument de Tam. Elle a aussi perdu sa queue. Elle est coupée trop brusquement. L'esprit n'est pas satisfait;^ involontairement, on accompagne Tam jusqu'à sa ferme; on s'attend îk le voir paraître devant sa femme Kate, qui a eu le temps, pendant ces aventures, de tenir sa colère au chaud. Il y a là place pour une scène qui semblait annoncée au début et qui aurait fait un joli pendant à celle du cabaret et de la cabaretière. On imagine l'accueil de la fermière, les excuses de Tam, et son air penaud quand la lanterne lui révèle tout à coup l'étrange condition de Maggie. La morale aurait été mieux à cet