Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/86

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c’est votre plaisir. » « Avec patience et discrétion, dit un quatrième, je suis votre vassal et votre serviteur[1]. »

On n’arrivait pas d’emblée à être le vassal de sa dame. Il y avait des degrés à parcourir, un stage à accomplir ; la langue des troubadours a plusieurs mots pour désigner l’amant dans ces diverses situations. « Il y a quatre degrés en amour ; le premier est celui du soupirant, le deuxième celui du suppliant, le troisième celui de l’amoureux, le quatrième celui de l’amant. » Ce dernier terme n’indiquait pas d’ailleurs autre chose que l’acceptation par la dame des hommages poétiques du troubadour amoureux. « La dame recevait de lui un serment de fidélité que scellait ordinairement un baiser et le plus souvent celui ci était le premier et le dernier[2]. »

Mais cette faveur si péniblement acquise il était difficile de la conserver contre les jaloux et les envieux. De là découlaient pour l’amant de dures obligations.

La discrétion est une des premières qualités requises. Fi des amants grossiers qui compromettraient leurs dames par leurs chansons ! À ces imprudents maladroits aucun succès n’est réservé. Aussi la dame aimée est-elle en général désignée par un pseudonyme, qui n’est pas toujours très transparent ; c’est un senhal (signal) suivant l’expression technique. La fantaisie et l’imagination guident les troubadours dans le choix de ces pseudonymes ; mais ces noms, comme on peut s’y attendre, sont souvent pris parmi les plus gracieux ou les plus expressifs.

  1. Cf. Diez, Poesie der Troubadours, p. 128, 129,  etc.
  2. A. Restori, Lett. prov., p. 52.