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où il attendra le résultat des propositions anglaises pour l’évacuation de l’Égypte ». [1] En novembre 1801, elle parle à sa sœur de la guerre de course et des bénéfices que tirent les officiers de la capture d’un bâtiment ennemi. « Charles a reçu 30 livres sterling pour sa part de prise et en attend 10 de plus. Mais à quoi bon saisir des vaisseaux s’il emploie l’argent ainsi gagné à faire des cadeaux à ses sœurs ? Il nous a acheté des chaînes d’or et des croix de topaze. Il nous faudra bien le gronder… Je vais encore lui écrire par ce courrier pour le remercier et lui faire des reproches. Nous allons être vraiment trop belles ». [2]

Son indifférence envers ce qui n’atteint ni elle ni les siens s’accompagne d’un trait qui choque et semble indiquer dans son être moral une pauvreté, une sécheresse regrettables : elle ne sait pas laisser parler en elle la pitié humaine. Elle donne aux siens affection et dévouement, mais elle ne fait là qu’élargir son égoïsme puisqu’elle se refuse toujours à donner un mot de sympathie, une pensée de compassion, aux douleurs que ses yeux ne verront point. Son bon sens, ordinairement si juste, et son esprit pratique ont ici quelque chose d’étroit, de mesquin, qui font souhaiter de trouver à leur place moins de raison et plus de tendresse. En 1809, elle parle de « notre pauvre armée » à propos du départ prochain d’un de ses frères alors officier du « saint-albans » : « Le vaisseau partira bientôt pour aider à ramener ici le peu qui reste, selon toute probabilité, de notre pauvre armée, dont la situation semble être extrêmement critique ». Mais elle ajoute : « Il paraît que c’est dans notre voisinage seulement qu’on sait quelque chose du bâtiment « la régence » ; mes correspondants les plus occupés de politique n’en disent pas un mot. C’est jouer de malheur que d’avoir pensé à cette affaire et d’avoir perdu mon

  1. Lettres, 1er novembre 1800.
  2. Memoir of Jane Austen. Page 65.