Page:Annales de l universite de lyon nouvelle serie II 30 31 32 1915.djvu/294

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prochaine occasion, je suis heureux de vous envoyer la permission de le faire, permission qui vous dispense de toute autre demande ou formalité. Vos ouvrages récents, Madame, et en particulier « Le Château de Mansfield » font le plus grand honneur à votre génie et à vos principes. À chaque nouvel ouvrage, votre esprit semble gagner en force et en puissance d’observation. Le Régent a lu et admiré tout ce que vous avez publié. Acceptez mes meilleurs remerciements pour le plaisir que m’ont procuré vos livres. En les lisant, j’avais souvent éprouvé le grand désir de vous écrire pour vous féliciter. En même temps, j’aurais désiré vous demander de peindre, dans un nouvel ouvrage, le milieu, le caractère et les goûts d’un clergyman qui passerait sa vie, tantôt dans la capitale, tantôt à la campagne et ressemblerait un peu au « Ménestrel » de Beattie : « Muet dans la joie, affectueux quoique timide, — Mélancolique et réservé d’aspect, — Et parfois faisant un éclat de rire, sans que nul en sût la raison ». Ni Goldsmith, ni La Fontaine, dans son « Tableau de famille » [1] n’ont, à mon sens, exactement dépeint un clergyman anglais de notre temps, voué à l’étude des lettres qu’il aime par-dessus tout et incapable de causer jamais la moindre peine à qui que ce soit. Je vous en prie, chère Madame, réfléchissez un peu à tout cela.

Croyez-moi en tout temps, sincèrement et respectueusement, votre fidèle et obligé serviteur.

J. S. Clarke.


Jane Austen ne manqua pas de réfléchir à tout cela et le fit d’une façon dont le bon Mr. Clarke ne se douta jamais. Cette lettre lui fournit quelques passages de son « Plan d’un roman ». On lit, en effet, dans ce « Plan » satirique : « Le père de l’héroïne sera le plus excellent homme qu’on puisse voir, parfait sous le rapport des qualités, du caractère et des manières, sans le plus léger défaut ou la moindre originalité qui puisse l’empêcher d’être le plus agréable compagnon qui soit. Prêtre de paroisse de mœurs exemplaires, il sera passionnément attaché aux lettres… Au moment de mourir — cette scène se passera au Kamtchaka — le père épuisé se jettera à

  1. En français dans le texte.