Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 12-13.djvu/51

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avec de beaux arbres, mais sales et puants[1] ; des rues assez larges, mais pas entretenues ; des maisons à façades blanches, bordées au faîte d’une large bande peinte en brun, rouge ou jaune, avec des encadrements pareils autour des fenêtres et des portes, mais sordides et repoussantes à l’intérieur ; tel est le portrait peu séduisant qu’ont tracé de Lhasa les rares explorateurs européens à qui leur bonne fortune a permis d’y pénétrer.

Toute capitale qu’elle est, Lhasa ne peut prétendre au titre de grande ville, ni pour sa superficie, ni pour sa population, au sujet desquelles, il faut bien l’avouer, les voyageurs ne sont pas d’accord. Suivant les uns, elle n’aurait que 4 kilomètres de circonférence[2], tandis que d’autres lui en attribuent huit[3]. De même, au point de vue de la population, les appréciations varient de 15,000[4] à 80,000[5] habitants. Sur ce dernier point, ces divergences peuvent aisément s’expliquer par l’affluence d’une population flottante considérable à certains moments, principalement à l’occasion des fêtes religieuses, toujours accompagnées de foires avec des divertissements de toutes sortes. Au centre de la ville, s’élève le temple et monastère de Tsoum-dzé Khang, qui servait autrefois de résidence d’hiver au Dala’i Lama[6], et est entouré d’un immense bazar. À peu de distance de

  1. Huc signale, dans un de ces faubourgs, l’existence de maisons, construites avec des cornes de bœufs et de moutons, d’un aspect assez agréable : « Les cornes des bœufs étant lisses et blanchâtres, et celles des moutons étant au contraire noires et raboteuses, ces matériaux étranges se prêtent merveilleusement à une foule de combinaisons et forment sur les murs des dessins d’une nettelé infinie ; les interstices qui se trouvent entre les cornes, sont remplies avec du mortier. » (Voyage dans la Tartarie et le Thibet, t. II, p. 254.) Cette description fait songer à la « capitale aux maisons noires et blanches » d’Odoric de Pordenone.
  2. Léon Feer, Le Tibet, p. 22.
  3. Huc, Voyage dans la Tartarie et le Thibet, t. II, p. 253.
  4. Léon Feer, Le Tibet, p. 22.
  5. Dubeux, Tartarie, p. 266.
  6. Id., id.