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Au Tibet, le peuple a d’autres mœurs, mais n’est pas plus immoral que la plupart des autres nations d’un égal niveau de civilisation ; même, suivant le père Huc, « il y a peut-être moins de corruption que dans les autres contrées païennes[1] ».

La population du Tibet se compose d’éléments très divers, surtout sur ses frontières ; ainsi, au nord et au nord-est, elle est fortement mélangée d’Ouigours, de Mongols et de Chinois ; à l’est domine l’élément chinois et au sud-est l’élément indo-chinois (birman et annamite) ; à l’ouest, on constate la prédominance des types cachemirien, népaulais et lepcha ; au sud, on remarque l’invasion des types boutanien, assamais et même bengali. C’est dans le Tibet central qu’il faut pénétrer pour rencontrer la véritable race tibétaine, celle que les Chinois ont appelée successivement Kiangs orientaux, Tou-fan, Tou-pho et Si-fan, et qui se donne elle-même le nom de Bod-pa. Dans l’antiquité, les croyances les plus absurdes ont eu cours au sujet des peuples du Tibet. Tantôt on les dépeignait comme des géants redoutables, hauts de 8 pieds ; tantôt on racontait qu’il existait dans les montagnes une race d’hommes pourvus d’une queue courte, droite et inflexible, très gênante pour eux, car, vu sa rigidité, ils ne pouvaient s’asseoir qu’après avoir creusé dans la terre un trou pour la placer. Ces légendes se conservaient encore vivaces au Boutan, il y a un siècle[2], et sans doute elles n’ont pas encore disparu aujourd’hui.

Le Tibétain appartient à la famille mongole[3] ; mais, sans doute, fortement mélangée d’un autre élément[4] qui

  1. Huc, Voyage dans la Tartarie et le Thibet, t. II, p. 260.
  2. S. Turner, Ambassade au Tibet et au Boutan, t. I, pp. 240-241.
  3. Huc, Voyage dans la Tartarie et le Thibet, t. II, p. 256.
  4. Peut-être à la race Thaï, dont les Birmans et les Siamois sont les représentants. Il existe certaines similitudes curieuses entre le tibétain et le birman. En tout cas la langue tibétaine ne paraît pas être exclusivement mongolique.