Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 12-13.djvu/76

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jetâmes quelques petites pièces d’argent à ceux qui nous importunaient et la dispute qu’elles occasionnèrent entre eux nous donna le temps de nous éloigner. » Les couvents font aussi des distributions de nourriture à tous les mendiants qui se présentent, et ces libéralités ont pour résultat d’entretenir perpétuellement autour de chaque monastère une troupe de misérables ou de paresseux en nombre d’autant plus considérable que le couvent est plus riche et par conséquent plus généreux.

La politesse est une des vertus du Tibétain. Il salue en ôtant son chapeau, comme en Europe, et demeure tête nue devant toute personne qu’il respecte ; mais, par un usage singulier, quand il veut être particulièrement aimable et poli, il complète son salut par deux gestes qui paraîtraient au moins étranges chez nous : — il tire la langue en l’arrondissant et se gratte l’oreille. Quand il se présente devant un supérieur, il se prosterne neuf fois jusqu’à toucher de son front le parquet, puis, se retirant à reculons, il va s’asseoir sur le plancher à l’autre bout de la salle. S’il s’adresse à quelque lama de haut rang, après les prosternations de rigueur il demeure à genoux, la tête inclinée jusqu’au sol, jusqu’à ce qu’on l’ait autorisé à se relever. Un élément indispensable de la politesse tibétaine est le don d’une sorte d’écharpe de soie appelée Khata (Kha-btags[1] ou dga’-ltag[2]), « écharpe de félicité ». Deux Tibétains de bonne compagnie ne s’abordent jamais sans se présenter mutuellement le Khata. S’ils sont de même rang, ils se bornent à un simple échange d’écharpe. Quand un inférieur est reçu par son supérieur, la première chose qu’il fait, après s’être prosterné selon l’étiquette, c’est de présenter respectueusement un Khata que le supérieur, quel que soit son rang,

  1. D’après Schlagintweit, Le Bouddhisme au Tibet, Annales du Musée Guimet, t. III, p. 122.
  2. Selon Klaproth, Description du Tubet, Nouveau Journal Asiatique, t. IV, p. 151.