Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 12-13.djvu/91

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à abriter les pèlerins et les dévots que la piété attire en ce lieu. Sur les murailles du péristyle, on a peint diverses figures d’une grandeur gigantesque, qui sont des emblèmes analogues à la mythologie tibétaine. Les deux principales de ces figures, peintes, avec des traits hideux, en bleu et en rouge, représentent les incarnations de Kâlî[1]. Les colonnes sont peintes en vermillon et ornées de dorures ; et sur le fronton qu’elles supportent, on voit le dragon de la Chine. Dans le centre du péristyle, il y a une grande porte qui fait face à la principale avenue du monastère. Précisément vis-à-vis de cette porte, est l’entrée du mausolée, au-dessus de laquelle il y a un trophée, assez semblable à une cotte d’armes (écu), entouré d’une balustrade. La pièce du milieu de ce trophée est une espèce de lance, dont le bout a la forme de la feuille du grand banian[2]. Elle est sur un piédestal très bas. De chaque côté, on voit un daim couchant avec le mufle fort élevé et le cou appuyé sur l’épaule d’une figure d’environ huit pieds de haut, qui est à une égale distance de l’un et de l’autre. Ces sculptures, qui sont richement dorées, occupent tout le dessus du portique et se trouvent tout à fait en avant du corps du bâtiment.

« Nous vîmes, sous le portique, un prêtre assis qui lisait dans un grand livre ouvert devant lui, et semblait ne pas s’apercevoir que nous étions là. Il était du nombre de ceux qui prient alternativement en cet endroit et qui sont chargés d’entretenir le feu sacré devant le tombeau. Il faut qu’il y ait sans cesse un de ces prêtres qui prie, et que le feu ne s’éteigne jamais. Deux pesantes portes, peintes en vermillon avec des bossages dorés, firent trembler l’édifice lorsqu’elles roulèrent sur leurs pivots, et que leurs battants massifs heurtèrent le mur. Nous reconnûmes alors que le bâtiment

  1. Il est très difficile d’identifier les personnages dont parle Turner ; très probablement ici il s’agit de la reine des Dakinis, appelée en tibétain mKha-sgro-ma, ou de la déesse Lha-mo.
  2. Le figuier sacré des bouddhistes.