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ASTRO

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connu par divers travaux d’astronomie physique. Dès novembre 1866, ce savant publiait, dans les Bulletins de la Société Royale, une notice sur la constitution physique du soleil, où il faisait entrevoir la possibilité de « rendre évidente par le spectroscope l’existence des flammes rouges que les éclipses nous ont montrées dans l’atmosphère solaire. » Pendant deux ans, cet observateur fit diverses tentatives pour atteindre ce but sans y pouvoir réussjr ; mais ayant perfectionné successivement ses instruments d’observation, il parvint, le 20 octobre 1868, à distinguer 3 raies brillantes en C, près de D et très près de F. La veille de cette découverte, il avait pris connaissance de la note où M. Rayet rendait compte de ses propres observations, faites à la presqu’île de Malacca pendant l’éclipse.

Deux mois auparavant, le lendemain même de l’éclipsé totale, M. Janssen avait conçu et mis à exécution une méthode analogue-. Voici en quels termes le savant physicien rend compte de son importante découverte :

« Pendant l’obscurité totale, je fus frappé du vif éclat des raies prolubérantielles : la pensée me vint aussitôt qu’il serait possible de les voir en dehors des éclipses ; malheureusement le temps qui se couvrit après le dernier contact ne me permit de ne rien tenter pour ce jour-là. Pendant la nuit, la méthode et ses moyens d’exécution se formulèrent nettement dans mon esprit. Le lendemain 19, levé à 3 heures du matin, je fis tout disposer pour les nouvelles observations. Le soleil se leva très-beau. Aussitôt qu’il fut dégagé des plus basses vapeurs de l’horizon je commençai, à l’explorer. » Ici, M. Janssen décrit en détail le procédé qu’il imagina pour observer le speclre des régions du disque où il avait vu la veille les protubérances lumineuses, et dit comment il tourna la difficulté de voir à là fois le spectre solaire et celui beaucoup plus faible des régions dont il s’agit. « J’étais depuis peu de temps, continue-t-il, à étudier la région protubérantielle du bord occidental, quand j’aperçus tout à coup une petite raie rouge, brillante de 1’à 2’ de hauteur, formant le prolongement rigoureux de la raie obscure C du spectre solaire. En faisant mouvoir la fente du spectroscope, de manière à balayer méthodiquement la région que j’explorais, cette ligne persistait, mais elle se modifiait dans sa longueur el dans l’éclat de ses diverses parties, accusant ainsi une grande variabilité dans la hauteur et dans le pouvoir lumineux des diverses régions de la protubérance. »

Ainsi M. Janssen put étudier les protubérances, et, comme il le dit lui-même, assister aux phénomènes présentés par une nouvelle éclipse qui dura toute la journée. Il reconnut ainsi que bs protubérances de la veille étaient

profondément modifiées et que la distribution de la matière gazeuse autour de la photosphère était tout autre que pendant l’éclipsé. Pendant plus de quinze jours il prolongea ses observations, el dressa des cartes des protubérances qui prouvèrent que ces immenses masses gazeuses se déforment et se déplacent avec une grande rapidité, souvent même quelques minutes. Voici d’ailleurs }es conclusions de son rapport : — ■

1° Les protubérances lumineuses observées pendant les éclipses totales appartiennent incontestablement aux régions circumpolaires ;

2° Ces corps sont formés d’hydrogène incandescent et ce gaz y prédomine, s’il n’en forme pas la composition exclusive ;

3° Ces corps circumpolaires sont le siège de mouvements dont aucun phénomène terrestre ne peut donner une«idée, des amas de matière dont le volume est plusieurs centaines de fois plus grand que.celui de la terre se déplaçant et changeant complètement de forme dans l’intervalle de quelques minutes.

Aussitôt qu’on eût connu la nouvelle méthode d’observation des protubérances solaires en dehors des éclipses, divers observateurs se mirent à étudier le soleil à ce point de vue. M. Lockyer prouva que non-seulement des masses gazeuses incandescentes s’élevaient en divers points au dessus de la surface de la photosphère, mais que cette surface est elle-même recouverte d’une couche continue dont l’épaisseur moyenne est d’au moins 8,000 kilomètres. En effet le spectre des protubérances se voit sur tout le contour du disque du soleil ; cette observation fut confirmée par le P. Secchi, qui, ayant en outre mesuré la position de la raie brillante ’ jaune, voisine de D, reconnut qu’elle ne coïncide ni avec la double raie D, ni avec aucune des autres raies sombres du spectre solaire. D’après M. Rayet, cette ligne jaune se voit sur tout le pourtour du disque, avec une facilité au moins aussi grande que les trois lignes de l’hydrogène ; le gaz incandescent auquel elle correspond est donc, au même titre que l’hydrogène, un des éléments constitutifs de l’atmosphère solaire. Nous ne pouvons d’ailleurs rapporter ici un nombre considérable de détails d’observations dus aux astronomes que nous venons de citer. MM. Janssen, Secchi, Lockyer, et dont les uns et les autres ont peut-être le tort de vouloir tirer des conséquences prématurées. .

La chromosphère — c’est le nom donné à la couche gazeuse incandescente qui enveloppe le soleil et donne lieu à un spectre formé de raies brillantes — la chromosphère, disons-nous, repose-t-elie ou non immédiatement sur la photosphère ? en est-elle complètement distincte ? est-elle enveloppée elle-même d’une atmos-