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de Robinson Crusoé.

eusse tué plusieurs pour mon usage. Je travaillai après cela à faire cinq nouveaux enclos, mais plus petits que le premier. J’y fis plusieurs petits parcs, pour y chasser les chèvres, enfin de les prendre plus commodément ; & des portes, afin qu’elles pussent passer d’un enclos dans un autre.

Ce ne fut qu’assez tard que je songeai à profiter du lait de mes chèvres. La première pensée que j’en eus, me causa un très-grand plaisir. Ainsi, sans balancer long-tems, je fis une laiterie. Mes chèvres me rendoient quelquefois huit ou dix pintes de lait par jour : je n’avois jamais trait ni vache, ni chèvre, & n’avois jamais vu faire le beurre, ni le fromage ; mais comme la nature, en fournissant aux animaux tous les alimens qui leur sont nécessaires, leur dicte en même tems les moyens d’en faire usage, ainsi moi je vins à bout, après néanmoins bien des essais & plusieurs fausses tentatives, de faire du beurre & du fromage : & depuis je n’en ai jamais manqué.

Que la bonté de dieu paroît bien visiblement, en ce qu’il tempère les conditions qui semblent les plus affreuses, par des marques toutes particulières de son affection & de sa protection ! En combien de manières ne peut-il pas adoucir l’état le plus fâcheux, & fournir à ceux-là même qui sont dans les plus noirs cachots de puissans motifs pour lui rendre leurs plus sincères actions de