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Les aventures

une condition de vie bien différente de celle que j’ai dépeinte jusqu’ici.

Un jour que j’allois à mon canot je découvris tres-distinctement sur le sable les marques d’un pied nud d’homme. Je n’eus jamais une plus grande frayeur ; je m’arrêtai tout court, comme si j’eusse été frappé de la foudre, ou comme si j’eusse eu quelque apparition. Je me mis aux écoutes, je regardai tout autour de moi ; mais je ne vis rien & je n’entendis rien : je montai sur une petite éminence pour étendre ma vue ; j’en descendis & j’allai au rivage mais je n’apperçus rien de nouveau, ni aucun autre vestige d’homme que celui dont j’ai parlé. J’y retournai, dans l’espérance que ma crainte n’étoit peut-être qu’une imagination sans fondement; mais je revis les mêmes marques d’un pied nud, les orteils, le talon & tous les autres indices d’un pied d’homme. Je ne savois qu’en conjecturer : je m’enfuis à ma fortification, tout troublé, regardant derrière moi presque à chaque pas, & prenant tous les buissons que je rencontrois pour des hommes. Il n’est pas possible de décrire les diverses figures qu’une imagination enrayée trouve dans tous les objets. Combien d’idées folles & de pensées bisarres ne m’est-il pas venu dans l’esprit, pendant que je m’enfuyois à ma forteresse.

Je n’y fus pas plutôt arrivé que je m’y jetai