Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/351

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de Robinson Crusoé.

trouvai plus à propos de l’enterrer, que de m’efforcer à en tirer le cadavre dehors.

J’étois alors dans la vingt-troisième année de ma résidence dans cette isle, & si accoutumé à ma manière d’y vivre, que, sans la crainte des sauvages, j’aurois été content d’y passer le reste de mes jours, & de mourir dans la grotte où j’avois donné la sépulture à la chèvre. Je m’étois même ménagé de quoi m’amuser & me divertir, ce qui m’avoit manqué autrefois : j’avoir enseigné à parler à mon perroquet, comme j’ai dit auparavant, & il s’en acquittoit si bien, que sa conversation a été un grand agrément pour moi pendant vingt-six ans que nous avons vécu ensemble. On débite dans le Brésil, que ces animaux vivent un siècle entier : il vit donc peut-être encore, & il appelle, selon la coutume, le pauvre Robinson-Crusoé. Certainement, si quelque anglois avoit eu le malheur d’aborder cette isle, & l’entendoit causer, il le prendroit pour le diable. Mon chien me fut encore un agréable & fidéla compagnon pendant seize ans, après lesquels il mourut de pure vieillesse. Pour mes chats, ils s’étoient tellement multipliés, comme j’ai déjà dit, que de peur qu’ils ne me dévorassent avec tout ce que je possédois, j’avois été obligé d’en tuer plusieurs à coup de fusils ; mais j’eus du repos de ce côté-là, dès que j’eu forcé les vieux à dé-