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de Robinson Crusoé.

chapitre ; & je ne doutai point que, si jamais il trouvoit une occasion d’y venir, il n’oubliât & ce que je lui avois enseigné sur la religion, & toutes les obligations qu’il pouvoit m’avoir. Je craignois même qu’il ne fût capable de me découvrir à ses compatriotes, & d’en amener dans l’île quelques centaines pour les régaler de ma chair, avec la même gaieté qui lui avoit été ordinaire autrefois en mangeant quelqu’un de ses ennemis.

Mais je faisois grand tort au pauvre garçon, ce dont je fus fort mortifié après. Cependant, durant quelques semaines que la jalousie me possédoit, je fus plus circonspect à son égard, & je lui fis moins de caresse, dans le tems que cet honnête sauvage fondoit toute sa conduite sur les plus excellens principes du christianisme, & d’une nature bien dirigée.

On croira facilement que je ne négligeois rien pour pénétrer les desseins dont je le soupçonnois ; mais je trouvai dans toutes ses paroles tant de candeur, tant de probité, que mes soupçons devoient nécessairement tomber à la fin faute de nourriture. Il ne s’appercevoit pas seulement que mes manières étoient changées à son égard ; preuve évidente qu’il ne songeoit à rien moins qu’à me tromper.

Un jour me promenant avec lui sur la colline dont j’ai déjà fait plusieurs fois mention, dans un