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de Robinson Crusoé.

accident terrible ; en un mot, je m’évanouis. Mais comme c’étoit en un tems où chacun pensoit à sa propre vie, on ne prenoit pas garde à moi, ni à l’état où je me trouvois ; seulement un autre prit ma place à la pompe, & me poussant à côté avec son pied, me laissa tout étendu, dans la pensée que j’étois mort ; & je ne revins à moi que long-tems après.

On continuoit de pomper; mais l’eau croissant à fond de cale, il y avoit toute apparence que le vaisseau s’enfondreroit ; & quoique la tempête commencât tant soit peu à diminuer, il n’étoit pourtant pas possible qu’il voguât jusqu’à pouvoir entrer dans un port : de sorte que le maître persista à faire tirer le canon pour demander du secours. Un petit bâtiment qui venoit justement de passer devant nous, hasarda un bateau pour nous secourir ; ce ne fut qu’avec beaucoup de risque que ce bateau approcha, & il ne paroissoit nullement praticable que nous y entrassions, ni qu’il nous abordât, quand enfin les rameurs faisant les derniers efforts, & exposant leur vie pour sauver la nôtre, nous leur jetâmes de l’arrière une core avec une bouhée, & lui donnâmes une grande longueur. Eux, bravant & la peine & le danger, s’en saisirent, & nous après les avoir tirés jusques sous la poupe, nous nous mîmes dans leur bateau c’est envain que nous