Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 10.djvu/174

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ne peuvent être plus favorables. J’ai le plus grand desir de connoître vos infortunes et de savoir par quel hasard singulier vous vous trouvez dans ces climats heureux. Le berger après s’être recueilli un instant s’exprime ainsi.

J’ai pris naissance à Corinthe, cette ville riche et puissante de la Grèce, notre patrie commune. Mon nom est Ciéobule. Né avec des passions vives et impétueuses, je me livrai dans ma jeunesse à bien des excès. Lorsque je perdis les auteurs de mes jours, j’étois dans un âge trop tendre, pour être sensible à ce malheur. Mon éducation confiée à des mains étrangères, fut entièrement négligée. Quand j’arrivai à l’époque du développement et de l’effervescence des passions, personne n’en modéra la fougue et l’emportement. N’étant arrêté par aucun frein, je franchissois tous les obstacles. Rien ne s’opposoit à mes goûts, à mes fantaisies. J’errois, je flottois au gré de mes caprices. Je ne suivois que l’impression du plaisir, et je me plongeois sans remords, comme sans retenue, dans la dissolution la plus effrenée. Héritier d’une fortune considérable, je ne trouvai, au lieu d’amis sincères, que de vils adulateurs ; et des corrupteurs infâmes, au lieu d’amis fidèles. Ils ont empoisonné la moitié de