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Les aventures

dessus il poussa de profonds soupirs, & je voyois ses yeux se remplir de larmes.

Ah ! monsieur, reprit-il, c’est une affaire faite, il n’en faut plus parler. « Une affaire faite, Atkins, lui dis-je ! Qu’entendez-vous par là » ? Je sais bien ce que j’entends par-là, me répondit-il ; je veux dire qu’il n’en est plus tems, & cela n’est que trop vrai.

Je traduisis au prêtre mot-à-mot ce qu’Atkins venoit de dire, & ce religieux zélé, qui malgré les opinions particulières de son église, avoit tant de soin du salut d’autrui, qu’il seroit absurde de croire qu’il fût indifférent sur le sien propre, ne put s’empêcher de verser quelques larmes. Mais s’étant remis, il me pria de demander à Atkins, s’il étoit bien aise que le tems de sa conversion fût passé, ou bien s’il en étoit touché, & s’il souhaitoit sincèrement de se tromper là-dessus. Quelle demande, dit Atkins avec beaucoup de passion ! Comment est-il possible qu’un homme soit content de se trouver dans un état qui ne peut finir que par des peines éternelles ? Je suis si éloigné d’en avoir de la joie, que je crains bien que le désespoir ne me porte un jour à me couper la gorge pour mettre fin à la crainte qui me donner de si mortelles inquiétudes.

Le religieux, à qui je rapportai les tristes pa-

roles