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de Robinson Crusoé.

les cris des malheureux habitans, qu’on traitoit d’une manière si affreuse.

Je n’avois jamais été présent au sac d’une ville ; j’avois bien entendu parler de Drogheda en Irlande, où Olivier Cromwel avoit fait massacrer tout le peuple, hommes, femmes & enfans. J’avois vu la description de la prise de Magdebourg par le comte de Tilly, & du massacre de plus de vingt-deux mille personnes de tout sexe, & de tout âge ; mais je n’avois vu rien de pareil de mes propres yeux ; & il m’est impossible d’en donner une idée, ni d’exprimer les terribles impressions que cette action abominable fit sur mon esprit.

Parvenu jusqu’à la ville, nous ne vîmes aucun moyen d’entrer dans les rues ; nous fûmes donc obligés de la côtoyer, & les premiers objets qui s’offrirent à nos yeux, étoient les ruines, ou plutôt les cendres d’une cabane, devant laquelle nous vîmes, à la lumière du feu, les cadavres de quatre hommes, & de trois femmes ; & nous crûmes en découvrir quelques autres au milieu des flammes. En un mot nous apperçumes d’abord les traces d’une action si barbare, & si éloignée de l’humanité, que nous crumes impossible que nos gens en fussent les auteurs ; nous les jugeâmes tous dignes de la mort la plus cruelle, s’ils en étoient effectivement coupables.