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de Robinson Crusoé.

teur, & autant d’épaisseur en quelques endroits.

Pendant que la caravane passoit par une des portes de cette espèce de fortification, je pouvois examiner ce monument si fameux pendant une bonne heure, sans pécher contre nos réglemens ; j’eus le loisir, par conséquent, de le contempler de tous côtés, autant que pouvoit porter ma vue. Notre guide Chinois, qui nous en avoit parlé comme d’un des prodiges de l’univers, marqua beaucoup de curiosité pour savoir mon opinion. Je lui dis que c’étoit la meilleure chose du monde contre les Tartares. Il n’y entendit point de malice, & prit cette expression pour un compliment fort gracieux ; mais note vieux pilote n’étoit pas si simple. Il y a du caméléon dans vos discours, me dit-il. « Du caméléon ! lui répondis-je ; qu’entendez-vous par-là ? » Je veux dire, reprit-il, que le discours que vous venez de tenir au guide paroit blanc quand on le considère d’ici, & noir quand on le considère de-là : que c’est un compliment d’une manière, & une satyre d’une autre. Vous dites que cette muraille est bonne contre les Tartares ; vous me dites par-là à moi, qu’elle n’est bonne que contre les Tartares seuls. Le seigneur Chinois vous entend à sa manière, & il est content ; & moi je vous entends à la mienne, & je suis content aussi. « Mais ai-je grand tort, dans votre sens, lui dis-je ? Croyez-vous que cette