Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/333

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deux pattes, & ne quitte jamais ce qu’il tient, à moins qu’on ne le lui arrache de force. Les gens du pays, qui connoissent l’inclination de cet animal, mettent sous les arbres où il fait sa retraite, des cocos gros comme les deux poings, remplis de riz ou de fruits ; avec un trou assez grand pour passer la patte du singe : le singe, curieux & avide, n’aperçoit pas plutôt ces cocos, qu’il y court, & y porte les deux pattes, & les remplit du riz qui est dedans ; mais il est fort surpris que le trou, qui étoit assez grand pour des pattes vides, est devenu trop petit pour des pattes remplies ; il s’agite, il secoue la patte, il crie, il emporte avec lui les deux cocos, se roule avec eux en frappant la terre & les arbres, pour les casser ; mais jamais il ne peut se résoudre à quitter prise pour se mettre en liberté. Le chasseur, qui le voit engagé, court à lui : en vain l’animal veut gagner l’arbre, son asile ordinaire ; il ne peut grimper avec ses pattes embarrassées, & sacrifie ainsi sa liberté à son avidité.

Sa curiosité n’est pas moins grande. Un singe de la forêt, récemment apporté sur un vaisseau où j’étois, n’avoit jamais vu de chandelle allumée : quand il fut nuit, & qu’il en vit une, pour la première fois, sa curiosité le fit